En attendant Bojangles : de l'altérité au ravage
Un très beau roman à lire en écoutant Nina Simone
C'est leur enfant. Alors il raconte leur histoire en même temps que la sienne. La vie d'un petit garçon qui ment à l'endroit et à l'envers pour s'assurer une histoire qui tienne debout. Ses parents dansent sur Mister Bojangles. Ils dansent à n'en plus finir. Ils s'aiment, inventent des fêtes extraordinaires, adoptent un oiseau aussi beau que le nom qu'ils lui donnent. Mademoiselle Superfétatoire devient un élément du tableau familial, comme le sénateur et ami. Celui qu'on surnomme l'Ordure et qui pourtant est toujours là dans les meilleurs moments comme dans les pires.
Olivier Bourdeaut, lauréat du prix du roman des étudiants France Culture - Télérama 2016, signe ici son premier roman en entrant dans la fiction par l'amour et la maladie mentale. Le fils n'est pas seul à prendre la parole. Quand le père le fait, il ne choisit pas. "Hystérie, bipolarité, schizophrénie" : les médecins le font à sa place. Lui préfère la poésie, le tourbillon de la danse. Son épouse vit dans un autre monde : le tourbillon quotidien trouve des bords au petit matin. Le château en Espagne s'offre comme un autre lieu : celui de l'insouciance d'abord, de la fuite ensuite, quand la maladie ravage l'appartement et que l'hôpital psychiatrique fait glisser la mère vers l'extinction.
Elle n'a pas de prénom, ou plutôt elle en a mille. Ceux que son époux lui donne, différents tous les jours. Comme les mille péripéties qu'elle vit et que son mari et son fils suivent malgré eux. Pourtant, ils ne sont pas sans prendre des décisions. Définitives parfois.
Raconté à hauteur d'enfant, le tragique ne l'est jamais complètement et il traduit bien le sentiment d'impuissance des proches face au trouble d'un être cher. L'incompréhension de cette altérité maintient dans une dépendance le fils. Comme si l'infantile était toujours le lieu touché par le ravage de la maladie mentale d'un autre.
Commentaires
Enregistrer un commentaire