The lobster ou la tyrannie des injonctions

The lobster est un film étrange, mais de cette inquiétante étrangeté que nous reconnaissons comme une proximité, une atmosphère étrange mais des scènes qui nous en rappellent d’autres.

Il y a d’abord l’hôtel qui est en fait un centre de rééducation pour célibataire dans lequel les règles sont drastiques entre interdiction de la masturbation, bal obligatoire quotidien et chasse collective aux célibataires vivant dans les bois.
Il y a donc ensuite les bois, sorte de lieu de relégation et de refuge pour ceux qui refusent l’obligation à être en couple. Mais les règles y sont tout autant contraignantes, entre l'obligation de danser seul, l’interdiction d’être amoureux et des punitions atroces en cas de passage à l'acte.



Entre ces deux lieux et les surplombant,  la société impose d’être en couple. Il ne s’agit pas de s’aimer pour autant. Les couples doivent se trouver un point commun. Pourtant ici, rien d’un désir commun, mais du concret, rien que du concret. Alors les couples se forment parce qu’ils ont tous les deux une belle voix, qu’ils saignent du nez, qu’ils sont myopes et j’en passe. Une fois en couple, ceux qui ont des problèmes d’entente se voient attribuer des enfants pour les aider (oui, ça fait rire la salle). Ces enfants n’ont pour seul devenir que d’être des clones de leurs parents. Des adultes qui se vivent d’ailleurs plutôt comme des jumeaux que comme des sujets cultivant leurs individualités.

Dans cette société, l’écart n’est pas possible. Elle n’est pas interdite, juste impossible. Quand le héros arrive pour sa rééducation, c’est-à-dire pour trouver une partenaire en quelques jours sinon il sera transformé en homard, il doit choisir entre hétérosexualité et homosexualité. La bisexualité n’est plus possible. Ce n’est pourtant pas formellement interdit, juste impossible. L’écart n’est plus envisageable, la variation devient suspecte.
Dans cette atmosphère pesante, faite d’injonctions, de normes, d’entrainements à être en couple – à l’hôtel rééducatif tous les hommes sont habillés de la même manière, il en est de même pour les femmes -, ce qui étonne c’est qu’un seul suicide survient.


Ainsi donc il s’agit bien des scènes absurdes, mais qui résonnent avec notre société faite de multiples injonctions et où la rapidité devient la norme. Une société dans laquelle la norme devient le viatique de chacun. Quand l’obéissance aux volontés des autres prend le pas sur l’écoute de son propre désir.

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